Les nouveaux espions (Friendly Spies): Le pillage technologique des USA par leurs alliésPeter Schweizer; Grasset 1993

Traduit de l’ouvrage américain « Friendly Spies », l’ouvrage nous apprend comment pendant des années les États-Unis ont été espionnés sur le plan économique, alors que simultanément les efforts étaient mis sur la protection des secrets militaire par ces temps de guerre froide.

Peu connu (ou du moins je n’en avais pas entendu parler avant de lire cet ouvrage) l’espionnage économique envers les américains par les forces occidentales (France, Allemagne) et asiatiques (Japonaise et Coréenne) était courant dans les années d’après-guerre et jusqu’en 1993, date de parution de l’ouvrage.

Composé d’une quinzaine de chapitre et d’une bibliographie conséquente, l’ouvrage très bien écrit nous dévoile en détail un petit nombre d’affaires d’espionnage économique qui ont pesé sur l’économie, en voici un petit florilège:

1980: Le vol des carnets Adirondack Workbooks d’IBM par Raymond Cadet (scientifique spécialisé dans l’informatique, employé d’IBM) récupéré par Barry Saffaie (Conseiller en informatique irano-américain) qui les revendra à Hitachi.

1980: L’organisation de soirées mondaine par Craig Spence pour le compte du groupe d’études politiques (GEP) et le Jetro dans le but de recueillir des informations à caractère économique et financier.

1977: Fujitsu récupère des puces volées via une taupe introduite chez Fairchild semi-conductor (Travaillant en secret pour Cray Research Corp.) sur des projets d’ordinateurs destinés à l’armée américaine.

1970: Le vol de microfilm industriel et de documentation auprès de Celanese Corp. spécialisé dans le domaine des films industriels de haute qualité pour le compte de Mitsubishi par Harold Ferrar, directeur d’une des usines de Celanese Corp.

1970: L’influence des services secrets allemands (BND) à la Maison Blanche via Darwin Edward London qui fut nommé président du comité exécutif du conseil national de surveillance au département d’état. D’autres agents allemands (noms de codes: Grande sœur et Petite sœur) ont également été en contacts avec des hauts fonctionnaires américains travaillant au sein de la Maison Blanche Les informations recueillis été directement envoyés  au chancelier Willy Brandt.

D’autres affaires sont également évoqués dans l’ouvrage (entre autre le vol de documents concernant les réacteurs de mirage français par le LAKAM, service secret israélien) ou encore la revente du logiciel CONTAM de la SAIC qui sert à étudier la « plume » émise par une fusée ou un missile lors d’un envoi dans l’atmosphère.

Pour terminer voici deux citations (qui au final se révéleront d’actualité quelques années plus tard):

Richard Helms, Directeur de la CIA, 1991: « Toutes sortes d’opérations industrielles, commerciales et financières réalisés par les entreprises-Tout particulièrement dans l’arène internationale- exigent le même genre de protection que celles dont bénéficient les secrets militaires ou les manœuvres politiques »

Commentaire de l’auteur: Et en France, nous en sommes encore à nous demander si la loi sur le secret des affaires est utile….

Alvin Toffler, futurologue: « Il va y avoir bien plus d’espionnage (dans le futur), mais ce sera de l’espionnage économique, financier. le savoir ressortit au renseignement stratégique. Les entreprises vont être des pépinières d’espions. Elles communiqueront leur butin d’informations aux gouvernements et la fusion des services de renseignements et publics est inévitable. »

Commentaire de l’auteur: En effet, avec l’affaire PRISM, nous avons bien vu à quel point des entreprises privés n’hésitent pas à travailler de concert avec les services de renseignement (Facebook, Microsoft). Voir aussi le livre de Jean-Jacques Cécile « Espionnage Business« 

En conclusion c’est un excellent livre, même s’il date un peu (1993) il permet de se rappeler que l’espionnage économique existe depuis bien longtemps et surtout on y apprend que les États-Unis ont été concernés par ces phénomènes. Petite satisfaction également lorsque l’on apprend que les services français (SDECE, DGSE) et allemand (BND) excellent (ou excellaient) dans le domaine de l’espionnage économique. Cet ouvrage est à lire en parallèle de « Espionnage Business » dont j’ai déjà souvent parlé, et qui permet ainsi de remettre la balance à l’équilibre en étudiant la façon dont les services secrets américains s’approprient les secrets industriels des autres pays….

Pour terminer, je signalerai tout de même quelques erreurs de traductions, mais qui n’enlèvent rien au contenu du livre.

*Ma note personnelle pour ce livre est de 5/5

*Tous les livres présentés sur ce site ont été lus et sont en rapport de près ou de loin avec l’intelligence économique.

Jonathan SCHELCHER

 

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