Le JETRO est un organisme d’État japonais dont le siège est implanté à Tokyo. Il a été créé en 1958, et se trouve être présent dans 55 pays. Un des bureaux est à Paris depuis 1963, et 38 autres bureaux sont au Japon. Il s’agit officiellement d’une agence administrative d’État à but non lucratif, qui collabore avec le MITI (Ministère japonais, de l’économie, du commerce et de l’industrie).
Comment est-il utilisé par le Japon ?
L’objectif du JETRO est de favoriser le développement des relations économiques entre le Japon et le reste du monde. Il a pour objectif premier d’avoir une balance commerciale positive. Aujourd’hui, le JETRO a pour mission essentielle de promouvoir les investissements étrangers au japon et de développer les coopérations. Le JETRO a donc été créé pour redresser la balance commerciale déficitaire japonaise des années 50-60, qui est redevenue solidement positive sans interruption de 1981 à 2009. De façon plus officieuse, le JETRO est en réalité un des systèmes d’intelligence économique les plus aboutis au monde dont les bases remontent à l’ère Meiji.
Le japon société de l’information
Pour bien comprendre l’importance du JETRO dans l’organisation japonaise il faut remonter à la constitution japonaise de 1868, qui mentionnait que le pays devait « chercher la connaissance dans le monde afin de renforcer les fondements du pouvoir impérial ». Les nouvelles missions du JETRO lui permettent ainsi de récolter un grand nombre d’informations à l’étranger via son réseau de dizaine de bureaux. Le JETRO peux ainsi contrôler l’information qui circule entre les différents pays, en augmentant sa présence à l’étranger.
La légitimité du JETRO par la culture japonaise
Le JETRO ne pourrait pas exister dans d’autres pays car il est profondément attachés à la culture de l’information japonaise. Le fonctionnement du JETRO repose essentiellement sur ce partage de l’information qui est une ressource collective et non en tant que ressource individuelle. Dans la société japonaise l’information circule à différents niveaux : administrations, universités, et également entreprises et conglomérats à travers le JETRO.
L’information au Japon ne représente pas un enjeu de pouvoir et ne donne pas lieu à une rétention (qui existe dans les pays occidentaux). L’atout du japon repose dans la culture de groupe et de partage. L’information est disponible comme un bien collectif et ne s’achète pas ni ne se revend. La raison principale de la culture de l’information est que les entreprises japonaises ont une culture du management à long terme et ne suivent pas une logique de rentabilité à court terme. La stratégie proposée dans les entreprises japonaises est fixée sur les 10 voire 20 prochaines années ce qui les différencies des entreprises occidentales.
Le système de récupération d’informations ; le MITI, l’IPP, le JETRO et le JICST
Après avoir exposé, la raison officielle de l’existence du JETRO et l’importance de l’information dans la société japonaise, voici quelle place occupe le JETRO dans la récolte d’informations. Le rôle véritable du JETRO ne peux s’expliquer sans celui du MITI (Ministry of International Trade and Industry). Le MITI est un organe chargé de la coordination, l’analyse et la circulation des informations vers les entreprises nippones. Selon Peter Schweitzer, le MITI finance l’IPP (Institute of Industrial Protection) créé en 1962 qui est un organisme chargé de former de jeune cadre à l’acquisition du patrimoine informationnel et d’informations sensibles. Il existe deux écoles semblables à l’IPP, dont les frais de scolarité sont intégralement pris en charge par les entreprises.
Puis ces jeunes cadres sont envoyés dans le monde pour faire la promotion du Japon et de ses produits à travers le JETRO qui collecte par la même occasion des données à l’étranger. Ces données sont envoyées au Japon et traité par le JICST (Japan Information Center of Science and Technology) qui tiens jour d’immenses bases de données.
Cette démarche s’inscrit dans le « techno-globalisme » qui est un ratissage minutieux méthodique et organisé de l’information pour une exploitation ou un échange d’informations avec d’autres puissances.
Japan 2000
L’exemple le plus souvent cité au sujet de l’acquisition récoltés en occident (aux États-unis) est celui des semi-conducteurs, qui selon Nicolas Moinet aurait pu aboutir à la 3eme guerre mondiale, les japonais ayant acquis la suprématie dans le domaine des semi-conducteurs, il devenait urgent pour les États-unis que ces technologies ne tombent pas dans les mains des soviétiques (1987). Les États-unis suite à cet épisode ont donc commandé en 1991 un rapport sur les services de renseignements japonais plus connu sous le nom de « Japan 2000 ».
Suite à ce rapport, le président Bill Clinton va décider de créer au sein des États-unis, les structures permettant de lutter contre les services du MITI et du JETRO, mais aussi par la même occasion des autres services occidentaux (la France notamment) appelés Friendly spies à travers la création du National Economic Council.
Conclusion
En conclusion, au lendemain de la seconde guerre mondiale et la fin de l’occupation américaine du Japon celui a dû faire face à un manque de croissance et un PIB faible [Chalmers, 1986]. Le Japon s’étant engagé dans une ère de l’information, de par sa constitution, a créé le JETRO dans l’objectif de promouvoir ses produits (diffusion d’informations) et augmenter ses exportations.
Depuis 1990, les missions du JETRO ont changées pour servir de réseaux facilitant le développement des échanges et partenariats économiques. A travers ces échanges, on aperçoit en filigranes, le nombre d’informations échangés et capitalisés par le Japon. De plus, un des facteurs davantage (du moins à l’époque) était d’avoir un capital informationnel positif (avec plus d’informations reçues qu’émises) ce qui était rendu possible par la difficulté de traduction de la langue japonaise en langue occidentale. C’est donc sous couvert d’une organisation à but commerciale, que le Japon a récolté des milliers d’informations à travers ses nombreux bureaux dans le monde, avec pour objectif de créer une puissance japonaise basée sur la connaissance (cette évidence est également mise en avant dans le rapport Japan 2000).
Jonathan SCHELCHER